Cassiopée et Orion
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La poupée aux yeux vides

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1La poupée aux yeux vides Empty La poupée aux yeux vides Jeu 10 Déc - 2:44

Cherry

Cherry
Admin

Le choc a été violent, implacable. Fatal. Cherry s’effondre sur le sol comme un arbre déraciné, les yeux encore écarquillés d’étonnement. Elle a vu venir la batte vers elle, mais n’a pas pu esquisser un seul mouvement pour l’éviter. Il n’y a pas eu de ralenti, comme dans les films, ni même de longs cris de protestation… Rien que le tumulte de la bataille qui a éclaté pour une raison inconnue. Il y a quelques minutes encore, tout allait bien.

Allongée sur le sol, comme une poupée de chiffons, dans un silence immense et soudain qu’elle ne s’explique pas, Cherry ne voit plus rien. Aucun muscle ne lui répond. Ses yeux vitreux sont pourtant grands ouverts sur le vide. La partie gauche de son crâne n’est plus qu’un magma ensanglanté, bouillie répugnante d’éclats d’os, de cheveux et de sang. Rien que ce noir absolu, les battements affolés et irréguliers de son cœur, et les milliers de questions qui tourbillonnent dans sa tête. Beaucoup de pourquoi, de comment, de qui. Elle n’a même pas mal. Alors c’est ça, mourir ? Déjà ?

Doucement, la lueur ténue d’une veilleuse électrique bon marché. Elle la reconnaîtrait entre mille, cette chambre.


- Zoé ?

Elle n’entend pas sa voix, elle a pourtant dû le dire… Du moins la poupée inerte qu’elle est encore pour quelques instants. Elle se sent ici et là… Ici, la masse confuse de son corps sur le sol de terre, l’impression d’une présence à ses côtés, qui la touche peut-être, mais aussi là, dans la chambre avec ses meubles roses, le mobile avec les papillons, la petite bibliothèque de bois peint croulant sur les livres de contes, et le lit de Zoé, qui la regarde. Le petit corps chaud de Zoé, blotti sous les draps, qui la regarde et lui sourit.

- Zoé ?

C’est elle, ses boucles adorées, la poupée solaire, la perle céleste, la seule, l’unique… Sa Zoé… Alors, c’est fini ? Si elle a retrouvé Zoé, ça veut dire qu’elle a perdu… Un éclair de panique lui broie le cœur.

- FELIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIM !

La deuxième voyelle s’élève en un aigu insupportable, vrillant le crâne de ceux qui sont à portée de voix, semblant ne jamais vouloir s’arrêter, infinie douleur. Elle hurle à s’en arracher les poumons, à s’en déchirer la gorge, comme si ce cri était son seul espoir de vie, l’ultime possibilité de le retrouver encore un peu…

Elle ne s’est pas entendue. Le hurlement s’arrête comme il est venu, brusquement. Alors, elle l’a perdu… Tout ça est bien fini. Elle se tourne vers Zoé, s’assied sur le rebord du lit. Des larmes perlent à ses paupières, joie, tristesse, tout cela à la fois. On ne peut pas tout avoir, Zoé. Tu l’as toujours su, toi, pas vrai ? Une main tremblante caresse les cheveux de la petite fille. Zoé, Zoé, Zoé… Un chant s’élève, une berceuse, que la poupée de chair pas encore morte fredonne tout doucement sur le sol de la Ville Rouge, que Cherry murmure dans la chambre de Zoé. Tout se confond. Zoé parle. La mélodie s’interrompt. Encore une histoire, Zoé chérie ? La dernière, alors… Regarde, il fait déjà si noir…

- Si noir, si noir, si noir, si noir, si noir, si noir…

La lourde masse encore en vie répète inlassablement les deux derniers mots, dans un écho de cet autre part où elle se trouve aussi. Cherry fronce les sourcils. Ce n’est pas une sensation très agréable. Mon dieu, la peine immense qu’elle va faire à Felim… Où peut-il être, en ce moment ? Près d’elle ? Peut-être qu’il n’a encore rien remarqué, qu’il est perdu dans la confusion de la bataille…

- Felim…

Felim. Ils avaient des projets. Elle caresse le visage tendre de Zoé. Qu’est-ce qu’il va faire, maintenant, sans elle ? Y arrivera-t-il ? Oui, une dernière histoire, Zoé chérie… La dernière, il faut que tu dormes. Ecoute, ma princesse, écoute…

- Zoé… Laisse-moi te parler… de l’Irlande…

Après une dernière explosion furieuse de battements confus, le cœur s’arrête. La dernière étincelle du regard de la poupée aux yeux vides s’évanouit.

2La poupée aux yeux vides Empty Re: La poupée aux yeux vides Jeu 10 Déc - 15:16

Felim Clancy

Felim Clancy

Tout s’était passé si vite et dans un désordre si complet que l’irlandais n’avait pu souffler qu’un vague « caches-toi » à Cherry. Rien ne s’était déroulé comme prévu. Au lieu d’un simple exercice, les Westlanders avaient subi une attaque irrégulière, frappés dans le dos par un traître qu’ils n’avaient jamais pu envisager. Un Rouge qui reniait les siens et choisissait la manière la plus vile pour le faire…

Cherry… Pourquoi elle ? La jeune femme n’était ni communiste ni une personne influente de la communauté. Son seul tort aurait pu être de vivre avec le diplomate des Khmers, mais tout le monde l’ignorait… Alors pourquoi ?

A genoux à ses côtés, Felim lui tenait la main, caressant de l’autre ses longs cheveux blonds maintenant ensanglantés. Quand la jeune femme hurla son nom, son cœur se brisa définitivement. Il l’aimait tant. Tout en elle était source d’amour : ses grands yeux marrons, ses cheveux bouclés, sa peau douce, sa voix, son rire, ses mains, sa démarche… Elle était sa raison de vivre, de respirer, de se lever, de marcher, d’espérer. Elle était tout. Elle était Amour.

Les yeux de l’irlandais se brouillaient de larmes pendant que son âme s’emplissait de haine. Dieu qu’il avait mal. Il entendait sa voix faible qui partait pour un monde qu’il ne pouvait pas encore toucher. Elle n’avait sûrement plus conscience de sa présence mais il ne put s’empêcher de se pencher à son oreille pour lui murmurer :


Milis Cherry… Attends-moi…

Il embrassa ses lèvres devenues pâles et froides au moment où elle rendait son dernier souffle.

NOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOON !

Déjà autour de lui se formait un groupe d’habitants. Leurs voix ne lui parvenaient pas. Totalement absorbé dans sa douleur, Felim serra le corps de la femme qu’il aimait contre lui et la souleva avec délicatesse. Sa princesse était si légère. Et si belle, même dans la mort. Ils auraient pu danser encore tant de fois…

L’irlandais la transporta à l’écart de la petite communauté, jusqu’à la clairière où ils avaient fait l’amour pour la première fois. Il déposa son corps dans l’herbe et s’assit auprès d’elle... Dans un arbre, Maorga observait son maître…


Je t’avais promis une maison sous les étoiles. Elle le sera. Orion veillera sur toi et quand j’aurai arraché le cœur de ce salaud, je reviendrai auprès de toi et nous regarderons ta Zoé jouer sous les arbres. Et nous serons heureux Cherry. Tous les trois. Pour toujours.

Des sanglots vinrent éteindre sa voix. Il devait agir vite et retrouver Xian. Lui faire payer. Peu importe le prix à y mettre. Mais déjà, il devait protéger Cherry. Jamais elle n’aurait supporter l’idée que d’autres puissent la voir ainsi, jolie poupée sanguinolente et de marbre.

En quelques minutes il avait réuni ce dont il avait besoin. Un drap blanc servit de linceul à la jeune femme. Et avec rage et fureur, l’irlandais creusa sa tombe. Les larmes continuaient de maculer ses joues, laissant des sillons dans la poussière terreuse qui s’y déposait. Il repoussait toute aide proposée d’un regard furibond et creusait, seul, à gestes furieux et rapides jusqu’au moment où la tombe fut suffisamment profonde.

Sa dernière demeure. Il l’y emmena avec tendresse, prenant un soin infini à l’allonger au fond de ce trou infâme. Quelques larmes maculèrent le drap avant qu’il ne se mette à accomplir les gestes les plus douloureux de sa vie. Recouvrir de terre celle qu’il aimait. Lui dire adieu. La laisser partir, en priant pour qu’elle soit enfin en paix… Une dernière pelletée et ce fut fini. Sur le petit monticule de terre, Felim déposa une fleur sauvage avant de traverser la foule réunie d’un pas rageur…





Les heures suivantes lui parurent interminables. Il fallut d’abord le convaincre de ne pas monter une attaque solo, puis regrouper les volontaires pour mener l’expédition avec lui, retrouver les traces de Xian, et enfin armés tout ce petit monde pour ne pas connaître de nouvelle désillusion.

Felim trépignait d’impatience. Et de haine, de fureur, de souffrance, emmaillotées dans un filet de délire fiévreux dû à la quantité phénoménale de drogue qu’il venait d’ingurgiter. Le visage de Cherry se superposait à sa vision, il la voyait partout, l’entendait hurler, et il croyait devenir fou. Quant enfin Patrick les autorisa à partir, chacun put lire l’intense soulagement qui passa sur son visage. L’heure était enfin venue…

Retrouver le chinois fut des plus faciles. Le groupe s’arrêta à quelques mètres de lui et l’irlandais avança seul, son couteau à la main. L’asiatique était de dos, sans doute occupé à se vanter par radio de son exploit pitoyable. Le jeune homme avançait avec lenteur et silence, comme un fauve prêt à bondir sur sa proie. Les années d’expérience dans l’Oglaigh ne se perdaient pas. Quand il fut derrière Xian, Felim l’apostropha d’une voix glaciale :


Tu vas crever bâtard. Et personne ne te pleurera.

Il ne lui laissa pas la possibilité de réagir. Dans un geste aussi rapide que précis, Felim égorgea le traître, éclaboussant de sang sa chemise déjà rougie de celui de Cherry. Puis il se pencha sur le corps de Xian et le frappa à de multiples reprises de sa lame, mutilant totalement le cadavre, jusqu’à ce qu’un de ses compagnons n’arrivent enfin à l’arrêter. Il s’empara alors du corps et le traîna par les cheveux jusque devant la Ville Rouge où il l’abandonna aux pieds des murs…

C’était presque fini. Cherry était morte. Son assassin aussi. Et lui alors ? Que lui restait-il ?

Felim contempla la Cité où il avait connu le meilleur et le pire. Il se sentait étrangement vide. Ses pas le portèrent jusqu’à la tombe de Cherry. Il pouvait enfin la rejoindre. Il l’avait vengée. Et plus rien n’avait de saveur ni de sens maintenant.

La lame trouva la carotide du premier coup. L’irlandais s’écroula à l’endroit même où il avait enterré la femme de sa vie. Son sang se mêla à la terre tandis que des râles d’agonie montaient dans les airs.

Ses paupières se fermèrent. Elle était là. Elle l’avait attendu. Il l’aimerait… Eternellement.

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