Noël, Joyeux Noëëël !

A gestes précis et discrets, Felim parcourait le corps de celle qui aimait. Ses lèvres se posaient parfois très doucement dans son cou, goutant de la pointe de sa langue la peau fine et sucrée. Il lui susurra :

Je t'aime Milis Cherry. Toujours un peu plus chaque jour.

Sa main finit par se poser sur le ventre de la jeune femme tandis que l'autre se perdait dans la chevelure dorée.

Elle était au-delà du bien. Elle planait littéralement, sans drogues artificielles. Elle répondit à son murmure par un baiser passionné, saisissant le visage de Felim entre ses mains pour ne pas lui permettre de s'échapper. Cela irrita profondément Zoé, qui leur lança un coussin en pleine figure.

- Mais vous m'écoutez pas! Vous faites toujours des trucs d'amour, y'en a marre! Moi je vais jouer avec Fusée, de toute façon!

Elle déposa sa tasse vide sur la table basse, et partit en bougonnant. Cela lui passerait vite. Elle avait hérité de la tendance à se plaindre de sa mère.

Felim regarda la gamine détaler en souriant.

Espérons que le chien l'épuise rapidement, sinon je serai contraint de te violer sous les yeux de ta fille.

Il lui rendit son baiser ardent et rajouta :

Tu es beaucoup trop belle. Ce n'est même pas acceptable. La perfection elle-même pâlit de jalousie devant toi. Tu finiras par me rendre fou Cherry.

- Tu es déjà complètement fou. Comme le chapelier toqué.

Il fallait qu'elle se dégage, sans quoi elle allait se laisser violer sans protestation, ce qui à n'en pas douter ferait désordre. Surtout avec la détestable habitude de Zoé d'entrer et sortir sans crier gare dans toutes les pièces de la maison.

Mais elle n'avait aucune, aucune envie de se dégager. Ses bras se nouaient autour de son cou et elle l'embrassa pendant que son corps tentait de faire marche arrière, ce qui ne rendait rien du tout.

- Je vais me faire poser une ceinture de chasteté diurne. Ca nous évitera beaucoup de peine.

Et qui te la poseras ? Que je le réduise en miettes pour oser simplement poser ses yeux sur ma femme !

Même au Paradis, Felim restait jaloux. Il serra la jeune femme par la taille et l'attira à lui.

Je t'en supplies, couches ta fille avant que je cours nu au fond du jardin pour me rafraichir !

- Tu sais bien que ce n'est pas à moi d'en décider! Si je la mets au lit de force avec un tel soleil, elle va faire pleuvoir des grenouilles partout, ou je ne sais quoi!

Elle gémit de frustration, planta un dernier baiser sur ses lèvres, et se dégagea. Au-dehors, Zoé courait toujours avec une fantastique et inépuisable énergie. C'était parfaitement désespérant.

- C'est peut-être de l'hyper-activité, je ne sais pas. Ou bien c'est nous qui sommes devenues complètement obsédés. Dans tous les cas, c'est inquiétant.

Bon et bien... Je n'ai plus qu'à m'atteler à dessiner les plans de cette superbe écurie.

Il sortit d'un tiroir une feuille de papyrus qu'il montra en souriant à Cherry et se mit au travail... Une écurie... S'il avait pensé dessiner cela un jour !

Elle frappa brusquement ses mains l'une contre l'autre, faisant sursauter Felim.

- Mais non! Je sais! Soyons des parents indignes, et envoyons-la en vacances! Mes parents sont quelque part, et elle le sait... Il suffit de la convaincre d'aller passer quelques journées chez eux, et nous pourrons souffler un peu!

Elle s'interrompit, et lui décocha un large sourire.

- Tu remarqueras que je suis admirable de décence. J'ai dit "souffler", et pas autre chose.

Felim releva le nez de son papier.

Cela signifiera que... je vais rencontrer tes parents ?

Brusquement il se sentit envahi de crainte. Rencontrer les parents de Cherry... Serait-il seulement à la hauteur ? Comment leur expliquer qu'il n'avait pu protéger et sauver leur fille ?

Elle se gratta l'arrière du crâne, soudain ennuyée.

- Mouais, t'as pas tort. Se contenter de se débarrasser de Zoé en lui faisant passer la porte, ce serait un peu léger. Ils seraient capables de se vexer... Surtout mon père.

Elle haussa les épaules, et se laissa tomber dans le fauteuil placé sous la fenêtre.

- Bon, laisse tomber. C'était mon quart d'heure idée de merde. Tant pis!

Il tenta de la détendre un peu :

N'avons nous reçu aucune publicité pour des colonies de vacances ? A croire que Zoé est la seule enfant du quartier, c'est incroyable !

Il se leva et vint l'embrasser.

Profites de ta fille. Tu as été séparée d'elle trop longtemps. Moi je peux attendre...

Elle lui sourit faiblement.

- Profite, profite, t'en as de bonnes, toi. C'est une enfant-démon. Elle en vaut douze du même âge. Demain j'aurai un poney de plus sur les bras, et ce n'est qu'une question de jour avant qu'un bébé éléphant ne trouve refuge dans le jardin!

Zoé était épuisante, mais elle se sentait tout de même soulagée de ne pas s'en séparer tout de suite. Il avait encore raison: elle lui avait manqué trop longtemps.

Et toi... As-tu été bien sage pour Noël, hum ?

La question était taquine, mais au fond de lui, Felim se demandait bien de quoi pouvait rêver la jeune femme. Surement pas de poney, ni de café puisqu'elle en avait maintenant, ni de le retrouver puisqu'il était là... Alors...

Elle lui adressa un large sourire d'enfant sage.

- J'ai été absolument admirable. Un ange. Le Père Noël m'apportera une montagne de cadeaux, rien de moins. Toi, par contre, je ne sais pas... Il me semble que tu oublies de m'embrasser un peu trop souvent!

Elle l'attira à nouveau pour plaquer ses lèvres sur les siennes.

Felim s'arrêta face à elle, les mains sur les hanches, un air dépassé sur le visage.

Non définitivement... Tu n'as pas d'auréole. Désolé. Tu as menti.

Il l'a prit dans ses bras et l'embrassa.

Et les menteuses sont toujours punies.

Elle fit mine d'être horriblement déçue, les coins de sa bouche s'affaissèrent.

- Alors tu ne me trouves pas angélique, c'est ça? Je n'ai pas été suffisamment adorable avec toi? Je n'ai pas cédé à tes moindres caprices... Non, attends, je sais...

Elle s'approcha de lui, et chuchota à son oreille, comme un secret:

- C'est à cause de ces perversités que tu me fais faire... Ca compromet mon auréole... La luxure est un péché capital...

Alors je préfère que tu sois un démon plutôt qu'un ange !

Il jeta un oeil par la fenêtre. Zoé courait toujours, à son grand désespoir.

Dis moi où est l'interrupteur sur Zoé. Et s'il n'y en a pas, je le demanderai en cadeau !

- Je ne sais pas sur quoi elle fonctionne. Pas sur secteur, c'est certain. Si elle a des piles, elle sont incroyablement performantes. Batterie, peut-être? En tout cas, demande la télécommande au Père Noël, moi je ne l'ai jamais trouvée...

Elle croisa les bras derrière la tête, et s'enfonça avec volupté dans le sofa.

Le jeune homme vint s'allonger à ses côtés et posa sa tête avec précaution sur les cuisses de Cherry.

Je demanderai un lot avec celle du poney !

Mais tu sais ce que j'aimerai plus que tout ?

Une main posée sur le torse de Felim, elle fit mine de réfléchir.

- Ce que tu voudrais plus que tout, là, tout de suite, c'est que je t'arrache tes vêtements et que je te fasse l'amour pendant des heures. Qu'on se roule dans la débauche et la luxure. Mais je doute que le Père Noël accorde ce genre de vœu...

Elle ferma les yeux, un léger sourire aux lèvres. Les glapissements de Zoé leur parvenaient à intervalles réguliers, couplés aux aboiements hystériques du chien. Impossible d'oublier leur présence tumultueuse...

L'irlandais sourit doucement.

Non Cherry. Ce que j'aimerai, c'est revivre le jour où je t'ai vu pour la première fois. Où j'ai pu admirer en silence ta beauté. Où j'ai entendu le son de ta voix que j'aime tant.

J'aimerai revivre ce jour fabuleux où tu es entrée dans ma vie, pour ne plus jamais en ressortir. Je crois bien que je pleurerai, de te trouver encore.

Il lui prit la main et en embrassa la paume avec amour.

Désarçonnée par sa réponse, elle ne put que lui sourire avec tendresse.

- J'étais épuisée et couverte de sable. Tout ce désert me déprimait. Le soleil me brûlait les yeux. Je voulais juste aller quelque part sur la plaine qu'on apercevait à l'horizon, et voilà que je tombais sur des gens qui avaient tous l'air plus tarés les uns que les autres! Et au beau milieu de cette bande de cinglés, un homme que la Pluie de Feu semblait avoir épargné tant il était impeccable, et qui se met à me parler de Cassiopée... Et j'ai bien failli sortir de ta vie. Je te rappelle que c'est moi qui t'ai relancé et retrouvé, pas l'inverse, que je sache!

Elle appuya un index taquin sur sa bouche.